Les roses étaient toutes rouges
Et les lierres étaient tout noirs.
Chère, pour peu que tu te bouges
Renaissent tous mes désespoirs.
Le ciel était trop bleu, trop tendre,
La mer trop verte et l’air trop doux.
Je crains toujours, — ce qu’est d’attendre
Quelque fuite atroce de vous.
Du houx à la feuille vernie
Et du luisant buis je suis las,
Et de la campagne infinie
Et de tout, fors de vous, hélas!
Je pensais vous avoir tout dit, ne plus avoir à cracher quoi que ce soit d'utile pour vous atteindre. Mais rien de pire que des questions sans réponses, laissées suspendues dans un froid auquel je ne m'acclimate pas encore. Sans en mourir tout à fait, je me laisse aller lentement sur la glace de votre corps, m'arrête là où vous n'êtes que dynamisme. Erreur !
Je n'ai pas compris pourquoi nous en étions arrivées là. Avez-vous eu peur, avez-vous mal interprété mes réactions bien souvent maladroites? Ces appels auxquels vous répondiez sont des sons sans écho désormais. Et j'ai mal de vous savoir à d'autres, regrette de ne pas avoir su capter votre force, suis amère de vous avoir fait fuir.
Tous ces écrits paraîtraient fous sans une lettre d'explication préalable, mais suis-je moi-même au fait de ces chamboulements dont vous êtes le déclencheur automatique? Pour vous les signaler, je cherche à les rationaliser, pour vous les livrer sans vous effrayer, sans voir dans votre regard si particulier quelque dégoût que je ne pourrais gérer.
J'ai besoin de concentration pour produire l'ultime écrit qui vous parviendra, en toute clarté. Composé dans la juste mesure qui trahira la profondeur des ressentis et mon savoir-faire, la sagacité de mon approche vers vous.
Pourquoi ces larmes? Elles me semblent légitimes lorsque l'on perd la seule personne de laquelle on se croyait intimement liée, naturellement connectée, l'unique qui ne vous rendait pas étrangère au monde. Ma jeune destinée se fera sans vous que je ne veux gâcher, et ma démarche est encore chancelante.
]]>Si cette nuit j'avais à vous dire au revoir? A vous tenir informée de mon départ et des surplombantes terreurs nocturnes?
]]>Pourquoi ce dédain? Vaut-il la peine que je l'écrive? Vos entreprises sont vaines et vos hauteurs indigestes. La volonté de m'enfuir prendra le relai de l'abandon à la passion qui nous liait et que vous avez alimenté jusqu'à m'en retourner la cervelle, écœurante manœuvre. Vos regards, vos démarches, souillés à présent. L'interpénétration des flux cérébraux et corporels à vos arrivées, à vos départs aussi ne se forme plus désormais que sous forme d'onde glacée. Puisque le mépris est un art auquel je ne m'emploie que par pure vengeance, je m'en délivrerai, bien loin de vos fixités gelées auxquelles je n'appartiens plus.
Apprenez que le silence n'est pas l'unique résidu qu'il me reste de vous mais qu'il vous trahit toute entière. Je vous sais fourbe mais vous excuse encore de vos soudainetés. J'ai chaque jour improvisé à vos humeurs: comprenez que votre agacement actuel est d'un repos sans faille avec lequel ma colère s'accorde pour parfaire un bel équilibre où vous êtes exposée en bête noire. Il ne s'agit plus maintenant que de vos faiblesses, vos failles intransigeantes dont s'accapare votre violence. Vos scintillement n'existent plus sous ce contrôle total de l'image qui vous constitue. Monstre nocturne, retournez à vos froideurs naturelles, boisées, solitaires. Je ne corresponds pas à vos montées de pression, quand vos tempes se resserrent sur votre front fait de pièces assemblées. Vous auriez du me recouvrir de la chaleur de vos conseils, j'aurais été disciple attentif, réceptacle de savoir. Mais votre vice réside en ce que vous me reprochez ouvertement ce que vous faites vous même: vous, être impolie, d'entrer dans votre sphère privée et en même temps d'être trop sage, réservée, retenue par la politesse qui réprime mes passions. Mais cet exercice de contenance était nécessaire à mon désordre, sans quoi vous n'auriez été que sujet de mes heurts, de ma passion sanguine.
Je reste néanmoins glacée de vous de vos absences qui font bleuir l'extrémité de mes doigts. Prisonnière de votre image qui m'apportait chaleur et avenir, sans qu'aucun accord n'ait été prononcé.
Que cherchez-vous à fuir, courant ainsi? Je suis éreintée de vos parcours, vos points de mire fatiguent mes yeux attentifs.
Dans la simplicité de l'instant, à l'écoute de l'Ellens Gesang III, je songe au tourbillon que vous avez semé dans ma vie ce soir guidée par une plénitude inattendue. Pourquoi me retiendrais-je d'inscrire les notions fuyantes qui parsèment mon esprit? Afin, peut-être, de vous écrire des lignes trop intelligibles pour être réellement inspirées. Je me délivre alors des carcans universitaires pour accéder à l'interdit de la pensée, à ce qui m'est refusé et aux écueils qui me font renoncer à exprimer mon sentiment trop prégnant. Ce monstre intérieur à qui vous donnez forme n'a qu'a se laisser guider par l'impulsion somatique, instinct précaire de la pensée qui prend essence dans un ventre bourdonnant. Vibrant à votre image, aux montées que la mémoire ressaisit et chamboule pour s'en accaparer sans n'en rien manquer. Aux descentes qui signent la perte dans une fuite redoutée. Je suis cette inconnue qui attend immobile et chancelante à la fois vos horaires et habitudes. Des heures durant, je m'élève à vos humeurs et provocations, m'adapte à vos absences pour jouir de vos retours. Éclaircies automatiques que je n'explique plus. C'est pour ces moments de glissement que ma patience s'active quotidiennement, dans l'idée de ces passages qui me rassurent. S'ils ne sont qu'abstractions vaines, mon trésor reste la certitude d'avoir trouvée l'unique Muse au pouvoir délicieux de l'exultation. Loin des illusions concrètes dans lesquels se noient ces autres desquels je vous figure éloignée. Je dresse le soir venu ces récits hermétiques afin de cloisonner ce que vous m'inspirez, ce qui n'est que mien, que votre, que notre dans une réunion mélodieuse. Appelez-moi folle, j'aime. J'apprends la valeur de ce qu'il ne faut pas perdre; au crépuscule de mes mots se forment vos signaux et dans ce pallier souvent semé de doutes, je trouve ma force.
]]>N'as-tu pas compris qu'aujourd'hui n'était qu'un prétexte pour puiser à tes mots l'essence qui compose ces lignes? J'ai escaladé ces hauteurs pour te rejoindre et attester de mes sentiments, ressentir ta dureté et m'en nourrir. N'être en fait qu'absence quand l'enchantement s'engage, lorsque mes mots se mêlent au tiens par la proximité que je suis venue te réclamer. Une attention de toi saccadée de cynisme. Si j'avais effleuré ta main...si j'avais su délivrer l'incorrect qui me hante et ce vice qui t'aurait fait rire jusqu'à la folie tu ne m'en aurais assuré que de plus belles lignes. Mais Muse je me suffis à boire l'ivresse de tes mots, cette substance d'un délice douteux. T'écrire s'annonce simple mais les mots, dans un renversement écœurant, ne s'en forment qu'en tourbillons à chaque rencontre. Je n'ai qu'à t'observer dans ta légèreté assurée, épier la finesse de tes traits au sein desquels courber mon corps, rapetisser jusqu'à être toi. Contiens-moi et élève-moi. Répond à mes échos pour ne pas que je sombre dans d'autres corps, retiens-moi puisque je t'appartient; définitivement, ne me gâche pas.
Ne cède pas à ces autres corps et contiens-moi;
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